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La mystérieuse pyramide de Falicon et la Grotte de la Ratapignata (Janvier 2010) (43°44'59.64?N 7°15'37.34?E / 43.7499, 7.2603722)

Découverte en 1803 par Domenico Rossetti, un avocat en vacances dans la région, cette pyramide ne cesse d'intriguer depuis plus de 200 ans, elle a fait l'objet de plusieurs publications depuis celle de Domenico Rossetti, La grotta di Monte Calvo (Format Pdf : 3000 Ko) en l'An XII. Elle est inscrite à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques depuis août 2007


Domenico Rossetti

Domenico Rossetti

Parmi les sommets des collines qui forment le bassin de Nice, il en est que nous indiquerons encore comme pouvant servir de but à d'intéressantes excursions. Ce sera d'abord le Mont Chauve au nord , un des plus élevés de ceux qui bornent l'horizon, ainsi nommé, soit de la nudité de son sommet conique, soit de l'étymologie du nom de Montcau qui dans le patois du pays signifie mont chaud, parce qu'on a supposé qu'un volcan avait existé jadis dans ses entrailles, circonstance dont il n'existe plus aucun vestige aujourd'hui.

La curiosité, le plaisir, la vue immense, sauvage, sublime, dont on jouit le long du chemin et surtout quand on est arrivé au sommet de cette montagne, y attirent fréquemment un nombreux concours d'étrangers : il faut environ trois heures pour s'y rendre. Le chemin, très accidenté vers le sommet, n'est praticable à cheval que du côté est de la montagne. Les cavaliers sont obligés de prendre la route de St. Barthélemy et de Gairaut, ou celle de Cimiez, qui aboutissent aux aires de St Michel; on traverse ensuite les campagnes de la Bastide et l'on arrive à Montcau en gravissant par Gairaut.

Un spectacle ravissant frappe les yeux du voyageur dès qu'il a atteint les hauteurs de Gairaut; et plus il monte, plus il est étonné des contrastes et des scènes sauvages qu'offre à ses regards le panorama d'une grande partie de la Provence, avec ses longues crêtes de montagnes, couronnées de pics et de pitons. Arrivé au sommet du Montcau, à l'aspect de cette nature presque muette, affectant les formes les plus sauvages et les plus heurtées, à l'aspect de ce vaste et sublime paysage, qui se déroule de toutes parts a ses pieds, il se sent amplement dédommagé des fatigues d'une course qui lui avait d'abord paru bien pénible.

A l'ouest, à l'est, au nord surtout, la vue se promène sur un entassement de montagnes, plus sauvages encore et plus majestueuses, dont les sommets neigeux, ou rembrunis par d'épaisses forêts, encadrent d'une ceinture magique ce tableau, dont ou ne peut détacher les yeux. Vers le midi le spectateur voit se dérouler à ses pieds, dans toute son étendue, la riante plaine de Nice, avec ses magnifiques coteaux, adossés aux collines environnantes, et dont les flancs, sillonnés de nombreux ravins, semblent, dans leur éloignement, ou se confondre avec la plaine, au sein d'une atmosphère vaporeuse, ou se dresser à peine, comme les vagues d'une mer agitée. De tous côtés, en plongeant les regards dans l'espace, on admire, sur les coteaux les plus rapprochés, le gracieux mariage de tous ces arbres, de toutes ces moissons, dont les Romains, anciens dominateurs de ces lieux, faisaient hommage à Minerve, à Gérés, à Pomone, à Palés. Nice avec son château, la pointe d'Antibes, le phare, la péninsule de St Hospice, le promontoire de St Tropez etc. placés sur le rivage de la mer, semblent, aperçu de cette élévation, sortir du sein des eaux, tandis que les méandres du torrent Paillon et du Var, promenant au fond du paysage leurs longs rubans argentés, ajoutent encore au charme et à la fraîcheur du tableau.

Quelles sensations vives et variées vous préparent encore sur cette hauteur la pureté, la raréfaction de l'air, ces toiles brises, si douces dans leur rapide passage, et l'aspect de ce vaste champ de mer qui réfléchit l'azur d'un ciel brillant! Sur cette plaine mobile, on aperçoit très-distinctement dans le lointain, à gauche l'île de Corse, plus bas, à droite, les îles de Ste Marguerite, que la fable et l'histoire ont pris plaisir à immortaliser. C'est en vain qu'on essayera de décrire, dans tous ses détails, le désordre, l'accumulation de richesses d'un pareil tableau ; la plume, le pinceau sont impuissants à les reproduire ; il faut les voir les revoir encore, pour pouvoir s'en former une idée.

Dans le quartier de la Bastide, au-dessus du chemin qui conduit a Montcau , une grotte frappe les yeux du voyageur ; on l'appelle la grotte de Falicon ou de Montcau, parce qu’elle est située tout près de ce premier village, et au pied de ce dernier mont. Les gens de la contrée la nomment encore la grotta de ratapignata , la grotte des chauves-souris , parce qu'en effet, elle sert de retraite à un peuple entier de ces mammifères volants, aux ailes membraneuses. Elle plonge dans le roc calcaire jurassique en ligne presque perpendiculaire, à la profondeur de 15 mètres, et l'on n'y peut descendre qu'au moyen de deux échelles, que fournissent les habitants des maisons voisines. Sa forme est à peu près celle d'une rotonde; sa plus grande longueur, 22 mètres; sa plus grande largeur, 15. Plusieurs colonnes cannelées, en forme de pyramides rondes, très-amincies au sommet, règnent autour et semblent soutenir la voûte. La plus remarquable se dresse presqu'au milieu, et frappe le regard par son élévation et par les cannelures et les incrustations, dont l'écoulement et le séjour des eaux ont orné sa surface. Derrière ces colonnes, règnent d'autres petites cavernes qu'on a qualifiées des noms pompeux, de salons, de chambres, de cabinets à la turque, et qu'on ne peut voir qu'à la clarté des bougies. Lorsque, de dix heures à midi, les rayons solaires pénètrent dans ce souterrain et que la clarté des bougies éclaire les petites cavernes, il y a là des minutes d'enchantement: les colonnes, avec leurs bizarres ornements, les capricieuses stalagmites qui sillonnent les parois, étincellent tout-à-coup de mille reflets chatoyants d'un effet le plus charmant.

Une petite issue qui s'ouvre dans le sol, sur un des côtés de la grotte , conduit, dit-on, à une autre caverne d'une grandeur à peu près égale et également soutenue par des colonnes; elle aboutit à une troisième plus petite, dans laquelle on n'a jamais pénétré: les gens qui fournissent les échelles prétendent même que, jusqu'à présent , un Anglais seul a eu le courage de descendre dans la seconde avec une lanterne, et au moyen de cordes.

Ces grottes ont été révélées, pour la première fois, au public en 1803 par un poème en trois chants de M. Dominique Rossetti élégant improvisateur. Quelques écrivains, dont M. Fodéré ont voulu surpasser en prose cette fantaisie poétique : ils ont décrit, avec amour, des nuages de draperies flottantes qui pendent et se balancent de toutes parts, ils ont compté des myriades de figures diaphanes qui tournoient sous les yeux du spectateur ; d'après ces écrivains on se sent emporté à des millions des lieues de notre planète. Le ravissement est complet ; on habite le palais des fées. Mais ces exagérations qui sont permises aux versificateurs, conviennent-elles au langage grave de la statistique ou de l'histoire ? Ici la vérité ne suffit-elle pas ?

Louis Roubaudi (1843)

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